Après un bon Tsampa en guise de petit déjeuner, nous partons pour le mont Everest, à 3 heures de route en terre. Le paysage est magnifique, nous sommes entourés de montagnes désertiques et parcourons une plaine rase. Certains nuages occupent les commets enneigés à plus de 6000 mètres, mais ils ne semblent pas bien épais, nous verrons bien. Nous continuons d’admirer le paysage, sur notre route sinuant entre les yacks et les marmottes.
A l’approche de l’Everest, nous sommes heureux de voir que le ciel s’est bien dégagé, et nous arrêtons pour prendre une série de photos devant le toit du monde. Nous parcourons encore quelques kilomètres et arrivons au dernier checkpoint avant la Montagne. Nous commençons à être habitués aux checkpoints, même si celui-ci est militaire tandis que la plupart sont policiers, et sortons de la voiture munis de nos passeports pour présenter nos papiers aux soldats de faction, dans une tente juste derrière la barrière contrôlant l’entrée des véhicules. Alors que le responsable est en train d’examiner nos passeports, visas et permis, quelques cris retentissent en chinois à l’extérieur de la tente. Nous n’y prêtons au début guère attention mais nous rendons compte par la suite qu’il s’agit de notre chauffeur et du militaire chargé d’activer la barrière. Comme toujours en Chine, lors d’un conflit entre un membre de l’armée populaire et un civil (et encore plus un tibétain !), c’est le militaire qui a raison. Il semblerait que notre chauffeur se soit approché trop près de la barrière et on nous demande donc d’attendre quelques instants, et de laisser passer d’autres groupes en attendant, en guise de punition. Après une dizaine de groupes qui nous passent devant, je demande davantage d’informations, mais on me dit d’attendre encore un peu. Finalement, nous découvrons avec stupeur que le chef du checkpoint comptevne jamais nous laisser passer ! Le chauffeur lui aurait répondu lorsque’ il lui a demandé de reculer, ou aurait critiqué l’armée en tibétain avec un de ses amis, mais à notre grand malheur, le chinois de faction comprenait suffisamment le tibétain pour se fâcher. Nous sommes désespérés : à cause d’un planton borné de 25 ans grand maximum, nous sommes bloqués a moins de 10km du camp de base et nous ne pourrons pas avancer d’un mètre de plus. Je demande des informations en chinois, disant que nous n’avons rien fait de mal, proposant de continuer à pied ou dans une autre voiture, mais le militaire me répond simplement et agressivement de demander à mon chauffeur pourquoi je ne verrai pas le mont Everest de près !
Heureusement, j’ai une sœur géniale et actrice. Alors que je m’agace devant l’absurdité administrative, Pamina commence à pleurer à chaudes larmes. Je suis ému par le désespoir de notre situation qu’illustrent ces larmes, et montre ma sœur en larme au planton en lui montrant les conséquences de son attitude, mais rien n’y fait. Dix minutes plus tard, alors que Pamina est remise de ses émotions, nous parlons et je lui demande en souriant si elle ne peut pas re-pleurer un coup, ce à quoi elle me répond « j’ai déjà essayé une fois mais ça n’a servi à rien, et c’est super fatiguant ! ». Toutefois, comme c’est notre seule issue, elle repart dans un beau sanglot digne des plus grands d’Hollywood. Cela n’a toujours pas beaucoup d’effet sur le planton borné mais émeut son subalterne, dont on sent qu’il aimerait bien nous laisser passer si ça ne tenait qu’à lui, et motive notre guide et notre chauffeur pour trouver une solution. Après une bonne heure, on nous apprend donc qu’un ami du chauffeur est lui aussi en route pour le camp de base, et que son frère est haut placé dans la police. Près de deux heures après notre arrivée au checkpoint, le planton décide enfin, grâce au frère du policier, à nous faire entrer dans la tente pour nous enregistrer et nous laisser passer. Il a pris les photos des permis de conduire et pièces d’identité du chauffeur, ainsi que note son nom dans un carnet et il me semble qu’il lui a fait comprendre qu’il ne repasserait pas le checkpoint de sitôt… Tout est bien qui finit bien, nous passons la barrière et nous arrêtons 100 m plus loin, au monastère ou nous logeons ce soir !
Nous n’avons pas mangé depuis le Tsampa de ce matin, et comme il est déjà près de 14h, nous avalons des raisins secs, amandes et barres énergétiques avant de nous préparer à marcher vers le camp de base, à une distance de 2h à 4h selon respectivement Lonely Planet ou Lobsang. Nous arrivons donc naturellement au camp de base après 1h40 de marche, dont dix minutes dans un petit monastère sur le chemin, dont le plus marquant était la salle centrale, dont les nombreux brûleurs dans un espace si fermé transformaient le bâtiment en four !
Nous prenons quelques photos et admirons la montagne dégagée au milieu d’une dizaine de touristes chinois, venus en car jusqu’en haut, puis reprenons la route en sens inverse, en nous arrêtant pour nous approcher quelques mètres d’une marmotte.
Une fois en bas, je commence à avoir assez mal à la tête et nous nous couchons tôt après une visite rapide au monastère et un dîner correct. Nous nous levons tôt demain et mets mon réveil à 6h pour espérer regarder les Etoiles lorsque cette satanée pleine lune sera couchée et le soleil pas encore levé.
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dernière mise à jour le 23/04/2014