Le lever à 6h30 est difficile, et j’aurais bien dormi deux bonnes heures de plus. Je paie un peu les étirements plus que bâclés de la veille mais moins que ce que je craignais. Nous partons ensuite en car vers Kaesong, à la frontière entre le Nord et le Sud du pays, à 165 km au sud de la capitale. Les photos sont interdites en dehors de Pyongyang a priori, mais comme Ri ne le rappelle pas, dans le doute nous mitraillons tant bien que mal, malgré la vitre et la vitesse du bus (voyageurs photographes futurs en RPDC : prenez des filtres polarisants !). La campagne coréenne est vraiment intéressante à regarder, il y a quelques petits tracteurs, quelques charrues à bœufs (maigres), beaucoup de travail fait à la main, des vélos et il est aussi intéressant de noter le nombre de piétons. Je ne sais quelle distance ils marchent chaque jour mais ce doit être assez conséquent. Il est aussi intéressant de noter que chaque parcelle de terre à peu près plate est cultivée (mais étonnamment pas les montagnes, exemptes de toute rizière). On voyage tout de même dans le temps quand on voit les techniques de cultures, mais pas beaucoup plus que dans certaines provinces chinoises ou vietnamiennes. Pendant que je prends des photos de la campagne marron, des bois d’où sortent nombre de faisans ou encore des agriculteurs accroupis dans leurs champs, Ri nous explique les différences entre les fermes d’État et les fermes coopératives. S’il est vrai que je m’attendais à voir une agriculture ancienne, c’est moins frappant que ce à quoi je m’attendais ; surtout, ce qui diffère de ce que j’avais lu est la réaction des passants à nos sollicitations : ils nous saluent ou sourient souvent lorsque nous passons devant eux et nous répondent également lorsque nous faisons de même, c’est donc assez loin des zombies de PY décris par Sweeney.
Nous nous arrêtons ensuite à mi-chemin pour l’escale technique d’usage, avec une boutique de souvenir sur le chemin, comme dans tout arrêt de voyage en groupe qui se respecte… Je suis toutefois assez déçu : je pensais qu’à l’instar des boutiques chinoises qui regorgent de produits dérivés de Mao Zedong, il y aurait des pin's, statuettes ou affichettes de la triplette de Kim à foison, mais il n’y a rien de tout cela. Je prends tout de même un t-shirt (en taille XL, même si je pense après coup qu’il est trop petit) et des cartes postales mais délaisse les poupées en habit traditionnel…
À mesure que nous nous rapprochons de la DMZ, nous passons des checkpoints (3 en tout), où les photos sont cette fois-ci fortement interdites (en plus d’être d’un intérêt assez médiocre).
Nous sortons ensuite du bus pour passer le premier rideau de la DMZ. La DMZ est large de 4km, chaque partie du pays gérant une bande de 2km. Nous pénétrons donc la bande septentrionale. Lorsque nous descendons du bus, on nous précise bien qu’on peut prendre des photos en direction du Nord, mais pas en direction de la porte d’entrée de la DMZ. Ceci a pour effet immédiat de voir tout le monde en train d’essayer de prendre cette porte en photo : soit en pressant le bouton de l’appareil sans viser, soit en utilisant les cameras inversées des téléphones ; les moins discrets ont le droit à un coup de sifflet autoritaire du garde puis doivent (faire semblant de) supprimer leur photo, qui n’a d’intéressant que sont illicité. Le commandant de la zone nous explique ensuite l’histoire militaire de la zone, via notre guide qui traduit : on apprend comment les Américains violent les traités qu’ils ont signé en possédant des armes lourdes dans leur partie de la DMZ (à noter que l’autre camp est constitué de l’ONU ou des États-Unis, mais il n’est presque jamais mention de la Corée du Sud).
On remonte ensuite dans le bus, qui a franchi le premier rideau à vide, pour aller à la véritable frontière, à 2km. Au milieu, la DMZ est constituée de champs, cultivés par les soldats et les locaux, au milieu desquels on peut voir un gigantesque mât portant le drapeau de la RPDC et faisant face &agrace; un mât similaire Sud-Coréen, visible au loin. Nous nous rendons ensuite dans la maison ou l’armistice a été signé. Le commandant nous explique que les Américains voulaient signer le traité sous une tente, mais comme c’était la première fois dans l’histoire des États-Unis qu’ils subissaient une défaite, les Nord-Coréens voulaient marquer le coup et construisirent donc en 5 jours une maison de 980 mètre carrés, puis comment les Américains, humiliés par la première défaite de leur histoire, avaient tenu à signer au nom de l’ONU et non en leur nom propre puis avait oublié de rapporter le drapeau qu’ils avaient apporté à la cérémonie, pour oublier ce mauvais souvenir, drapeau fièrement conservé et exposé dans cette maison devenue un musée de la guerre (on nous montre aussi toutes les preuves que la guerre a été lancée par les États-Unis). Le commandant nous explique aussi pourquoi les soldats des deux camps ne se côtoient plus : avant 1976, les soldats des deux camps accédaient au centre de la DMZ, mais alors qu’un sudiste coupait du bois sans prévenir et se faisait demander d’arrêter par un garde du Nord, il lui a lancé la hache à la figure, provoquant un grave incident ; depuis, les soldats ne se côtoient plus.
Au centre de la DMZ, on peut voir 7 bâtiments, 3 bleus gérés par l’ONU et 4 blancs gérés par le Nord. Le bâtiment central, sous contrôle de l’ONU, est ouvert aux public des deux côtés, mais alternativement (en général le matin pour le nord puis l’après-midi pour le sud). Le côté sud de la frontière était vide lorsque nous y étions.
Cours d'histoire à la DMZ et au musée de la guerre de Corée
Nous partons ensuite visiter un ancien temple/université/musée de l’époque Koryo, moins intéressant malgré quelques beaux Ginkgos dans la cour et l’apprentissage que le monde entier doit l’invention de la cuillère à la Corée.
Nous déjeunons après dans un restaurant pour touristes, on nous avons chacun droit à 11 petits mets, tous dans une petite coupelle dorée, et à une soupe de chien pour ceux qui le souhaitent (j’en ai donc évidemment pris un bol, qui était d’ailleurs la meilleure chose du repas à mon gout). En sortant, nous prenons en photos et sourions aux passants : écoliers rentrant de l’école, se tenant les coudes par groupes de 2 à 5, ou cyclistes, à un ou deux par vélo.
La lutte contre le sommeil est plus difficile sur le chemin du retour mais je me réveille tout de même pour la dernière heure du trajet, pendant laquelle Ri nous explique le système scolaire nord-coréen, comment elle est devenue guide pour touristes ainsi que d’autres aspects de la vie locale.
Cours du soir au college de Pyongyang
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dernière mise à jour le 23/04/2014